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[lecture] Don De lillo -- Mao II


bunee

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Le titre vient de cette célèbre oeuvre d'art d'Andy Warhol qui figure un dessin de l'illustre dictateur au crayon noir sur papier blanc, avec en arrière-plan un énorme rond de couleur violette (dans mes souvenirs)

"Et ils entrèrent dans la lumière du soleil américain"

Un individu noyé dans la multitude: et si l'avenir appartenait aux foules?

Ainsi commence de façon grandiose le roman.

Dans ce monde, l'avenir appartient aux foules et les terroristes ont gagné ce que les écrivains ont perdu. Les écrivains ont perdu le pouvoir d'influencer la société (on retrouve ici d'ailleurs les réflexions qu' Amos Oz livre dans "Les deux morts de ma grand-mère cf. ci-dessus).

La foule est en effet un thème récurrent, avec des émeutes dans les stades de foot, les dédales urbains, lors de l'enterrement de Khomeini... Ca devient un élément oppressant et saisissant.

Pour ce qui concerne l'influence décroissante de la littérature au coeur de la société: Comme le dira l'auteur lui-même dans une interview, le dernier écrivain dont le nom a engendré un adjectif est Kafka.

Les écrivains ont donc bien perdu de leur influence, ce qu'ont gagné les terroristes en manipulant la terreur. La terreur, seule arme efficace si l'on en croit les personnages du livre.

L'histoire est très bien écrite, avec un style vif et percutant qui me rappelle beaucoup celui de Wallace dans ses Entretiens avec des hommes hideux.

Tout d'abord on assiste au mariage parfaitement impersonnel de Karen dans un stade, avec un mari qu'elle ne connait que depuis deux jours et qui lui a été désigné par le révérend moon (dont l'adulation rappelle celle de Mao, d'ailleurs). Culte de la personnalité, lavage de cerveau, tout est décrit de façon très tangible du point de vue de cette femme.

La cérémonie se fait. Black out.

Quelques temps plus tard, New York.

Brita est une photographe qui chasse les écrivains. Son interlocuteur l'emmène, les yeux bandés, dans la cachette de Bill Gray, cet auteur mythique qui a disparu de la circulation depuis quelques années, et dont la dite disparition n'a fait qu'accroître la célébrité.

Huis clos assez étrange. On rencontre une jeune femme qui s'avèrera plus tard être Karen, que ses parents ont tenté d'enlever mais qui a ensuite fugué.

Ambiguïté des relations naissantes, les personnalités sont toutes multiples et ont toutes cette fêlure en elles.

Et Bill meurt doucement, rongé par le roman qu'il écrit et réécrit sans cesse, l'alcool et les pilules faiseuses de miracles.

Puis intervient la rencontre, où l'écrivain retrouve sa raison d'être face à des terroristes à Beyrouth qui ont pris un poete suisse en otage.

Les rôles se confondent et les limites deviennent floues: périple halluciné et méditatif emmenant Bill a Athènes, à Chypre, et au plus profond de lui-même.

Vraiment très bien.

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