Aller au contenu

[Lecture] Henri Troyat -- Faux jour


bunee

Messages recommandés

Henri Troyat -- Faux jour

Le livre de poche

Isbn 05.309.VI.5.0424

Dépôt légal n° 4475, 2ème trimestre 1965

241 pages

Livre trouvé dans le même carton que celui où gisait la lumière du nord, mais que j'ai cette fois parcouru avec intérêt.

Personnellement je connaissais Troyat -- de son vrai nom, Lev Tarassov -- essentiellement pour ses ouvrages biographiques qui ne représentent pourtant qu'une infime part d'une bibliographie prolifique .

Faux jour est son premier roman, et a été couronné du prix populiste de 1935.

Dans un discours de 1960 à l'Institut de l'Académie Française, au sujet de ce premier roman, le Maréchal Juin dira à Troyat:

"Mais ayant eu la surprise de constater dans vos premiers essais que votre écriture ne manquait pas de métier, vous vous avisâtes que vous pourriez bien être le grand écrivain anonyme que vous aviez si ardemment souhaité.

« Faux Jour », votre premier roman, édité en 1935 à l’âge de vingt-quatre ans, avait réalisé ce miracle.

Il avait fait sensation tant par la qualité du style que par le sujet traité et avait obtenu le Prix populiste. Dès sa publication, il avait semblé qu’un autre Raymond Radiguet, cet enfant de génie infortuné qui avait, dans son « Diable au Corps », étonné la critique par son langage et une psychologie volontaire visant à recréer un monde, venait soudain de réapparaître sous les traits du jeune militaire que vous étiez encore à cette époque.

Votre roman n’était-il pas, lui aussi, une fiction se donnant carrière dans un libre choix et sans arrière-pensée de reproduire quoi que ce fût ? Il campait un père hâbleur et clownesque, surprenant par sa verve, mais incapable, par manque de pragmatisme et de suite, de tirer le moindre parti des fruits de son imagination, — le type même du raté, qui ruine les siens, les achemine, le verbe haut, vers la misère et que son fils, désabusé, finira par juger sévèrement en le découvrant sous son vrai jour. "

Et au fond, je trouve cela vrai.

Faux jour, dont le titre est d'ailleurs extrèmement bien choisi, est effectivement un vrai petit miracle. Il m'a littéralement plongée dans l'âme de cet enfant qui vit sa relation avec son père en trois étapes: fascination, désillusion, puis révélation d'une affection sincère et détrompée.

La description de la figure du père est vraiment magnifique: un homme lâche, tapi dans des costumes mensongers de grandeur et d'autorité, se délectant des multiples embrouilles et affaires et des multiples femmes composant son histoire.

Histoire d'une déchéance où le personnage tant admiré va glisser vers le dénuement avec son fils, allant de tentatives avortées en projets interrompus et coups d'éclats.

Cette description haute en couleur et frôlant parfois le burlesque s'entremêle à une touchante image du fils, tour à tour pleine d'une admiration naïve, d'une vaine révolte et enfin de tendresse compatissante.

L'écriture est amusante et émouvante, parfois un peu naïve, mais sans s'aventurer dans le pathétique ou le larmoyant.

Un bel équilibre.

Lien à poster
×
×
  • Créer...